J’ai soif d’ignorance et d’être ignoré

Lorsque je partirai voler dans le ciel

ne pleurez pas     vos larmes sont des lames

sournoises qui m’abatteront certainement

ici-bas     dans ma fosse solitaire

 

non     ni chagrin ni regret lorsque la vie

m’aura rendu exsangue

et non plus ni fête et ni réjouissances

que ce jour soit comme les autres

sinon légèrement alourdie d’une banale poignée de poussière jetée

sur une terre meuble et fertile

 

ceci est-il un poème ou un testament

un testament peut-il se trouver à être fait de vers

ou peut-être doit-il porter lui aussi la sobre parure du deuil ?

 

nulle réponse

mais plutôt un labyrinthe sablonneux et sans fin

dans lequel j’avance à reculons et titube     chaque pas à l’arraché     arrache de ma peau

une vie galeuse     me laisse en bouche la douce-amertume du temps passé

à ne rien faire     et chaque pied devant l’autre     s’enfonce plus loin, se change en pierre

qu’est-ce que sont que ces sables mouvants où je m’enfonce     une plage sans fin

ou le temps lui-même, s’égrenant dans un sablier ?

 

Lorsque je mourrai passé cent ans     que le djembé en moi dans un bruit sourd

se fissurera rongé d’usure

et car ce jour viendra bien

lorsque je mourrai dans la pénombre

alors sera délivré de mon ventre    de mes tripes

ce rapace rouge avec lequel je me bats et me dévore    et qui s’envolera     immobile

 

Et lorsque je disparaîtrai dans un oubli complet     je laisserai un mode d’emploi qui dira

de ne pas renverser la roue

de n’écrire ni nom ni épitaphe sur la pierre

de ne pas faire ériger de pierre

de ne par me jeter dans l’anonymat mémoriel des cimetière

 

mais plutôt de me pousser avec légèreté     vers l’anonyme tiédeur des forêts vierges

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